A l'occasion des Jeux Olympiques, qui se dérouleront du 26 juillet au 11 août 2024 (et les Jeux Paralympiques du 28 août au 8 septembre), la Gazette Médopolitaine fait un saut dans le passé et retrace l'histoire des Jeux, organisés en France 100 ans plus tôt.
En 1921, après de nombreuses discussions et au détriment de Barcelone, Prague, Rome, Lyon, Amsterdam et Los Angeles (les deux dernières étant les villes candidates favorites), le Comité international olympique (CIO) se range derrière Pierre de Coubertin et donne l’aval pour la désignation de Paris comme ville hôte des Jeux.
Les Jeux Olympiques de Paris 1924 (autrefois appelés Les Jeux de la VIIIe Olympiade) restent dans la postérité car y sont nées plusieurs traditions qui n'ont depuis jamais disparu (appellation, village olympique, levée de drapeaux, forte présence des médias, etc.).
Les Jeux Olympiques d’été de Paris 1924
Les Jeux olympiques d'hiver se déroulant la même année pour la première fois de son histoire à Chamonix Mont-Blanc, cette édition des Jeux est la première sous l'appellation de "Jeux Olympiques d'été", avec la participation de 44 nations (Allemagne non invitée) et plus de 3 000 athlètes, dont 135 femmes, du 5 au 27 juillet 1924 (le rugby a débuté dès le 4 mai), afin de célébrer le sport, la culture et le savoir-faire à la française. Les épreuves sont disputées à Paris, dans les communes limitrophes (Colombes, Meudon, Versailles, Issy-les-Moulineaux, etc.) et dans d'autres villes du pays telles que Reims et Le Havre.
Des Jeux Paralympiques en 1924 ? |
Les premiers Jeux paralympiques se déroulent en septembre 1960 à Rome, peu après les Jeux Olympiques. Mais déjà en 1948, des vétérans de la Seconde Guerre mondiale participaient en fauteuil roulant aux Jeux de Stoke Mandeville au Royaume-Uni, organisés par un médecin britannique qui y voit des bienfaits dans la reconstruction psychologique de ces anciens soldats. De nos jours, les épreuves sont nombreuses et les handicaps davantage représentés (moteur, mental, sensoriel, etc.). Les athlètes sont répartis par classification : une lettre (qui correspond à la discipline concernée) et un nombre (selon le niveau de handicap : plus le nombre est grand, plus le handicap est léger). Les épreuves sont adaptées et passionnantes. |
Innovations en héritage
Les nouveaux équipements
Le Stade Olympique de Colombes : l'absence de stade adapté était un obstacle majeur. Malgré des fonds alloués modestes, voit le jour à Colombes, un stade, spécialement érigé pour l’événement, de 45 000 places dont 20 000 assises, avec eau chaude, éclairage électrique, chauffage des locaux, vestiaires pouvant accueillir jusqu’à 1 200 athlètes, piste d’entraînement aménagée sous la tribune et salle de presse sous les gradins. Il permit, le 5 juillet 1924, d’accueillir la cérémonie d'ouverture et aux athlètes de rivaliser dans 17 sports différents.
La Piscine des Tourelles est construite pour les épreuves de natation. C'est le premier bassin de 50 m à couloirs séparés par des lignes de bouchons en liège.
Le stand de tir de Tinqueux (près de Reims) est construit pour l’occasion et accueille les épreuves de tir.
Le premier Village Olympique d'été : auparavant, les athlètes logeaient à l'hôtel ou chez des particuliers. Le Congrès Olympique a décidé de confier le logement, le couchage et la nourriture des délégations au Comité d’organisation des Jeux. Pour résoudre cette question de l'hébergement, préfigurant l'idée moderne du village olympique, est installé un aménagement temporaire (boudé par les Etats-Unis) avec 66 baraquements rudimentaires de bois pour accueillir les hommes, (les femmes n’étaient pas logées au Village Olympique ; elles résideront séparément des hommes jusqu’aux Jeux de Melbourne en 1956), avec accès direct aux espaces sportifs. Les athlètes ont à disposition un bureau de change, un salon de coiffure, un bureau de poste, un kiosque à journaux, un service de blanchissage et un service de garde des objets de valeur. Trois repas par jour leur sont servis dans des salles à manger communes.
Les rituels de la Cérémonie d’ouverture et de clôture
Lors de la Cérémonie d’ouverture, pour la première fois, les délégations défilent avec le nouveau slogan olympique, "plus vite, plus haut, plus fort" (Citius, Altius, Fortius) devise toujours en vigueur, mais à laquelle s’est ajouté en 2023, le mot "ensemble".
Pour la première fois, lors de la Cérémonie de clôture, trois drapeaux sont hissés : celui du Comité international olympique, celui du pays hôte et celui du prochain pays hôte.
Les J.O. à la radio
Des épreuves olympiques sont commentées en direct à la radio grâce à l'arrivée de la TSF (télégraphie sans fil). Près de mille journalistes sont présents à Paris pour suivre les compétitions. De même, pour permettre aux spectateurs de bien suivre les épreuves dans le stade et les annonces, des haut-parleurs sont installés pour la première fois.
Art et Sport
Comme en 1912 et 1920, sur le thème du sport en Architecture, Littérature, Musique, Peinture et Sculpture, des épreuves artistiques ont permis, dans le cadre de ces J.O., à des artistes de rivaliser dans des compétitions.
Au même titre que les épreuves sportives, des médailles devaient être décernées pour chaque discipline aux trois meilleurs (vermeil, argent et bronze), mais faute d’accord au sein du jury, aucune n’a été remise en musique.
Des Performances Sportives Extraordinaires et des "héros"
Lors de ces Jeux, dix records olympiques sont battus et neuf records du monde sont établis.
La France remporte 38 médailles, dont 13 en or (4 en cyclisme, 3 en escrime, 1 en gymnastique, 2 en haltérophilie, 1 en lutte gréco-romaine, 1 en tir et 1 en water-polo) et termine à la troisième marche du podium. Quelques noms passeront à la postérité : Charles Rigoulot, l’haltérophile, ("l’homme le plus fort du Monde") ; les 4 Mousquetaires du tennis (Jean Borotra, Jacques Brugnon, Henri Cochet et René Lacoste, pourtant non médaillés d’or) ; Roger Ducret (5 médailles au total) remporte les 3 médailles d’or françaises en escrime.
Les Etats-Unis totalisent 99 médailles (dont 45 en or) et terminent loin devant les autres nations. Un nom toujours célèbre : le nageur Johnny Weissmuller (qui sera Tarzan au cinéma) gagne 3 épreuves de natation (et finit 3e avec l’équipe de water-polo).
La Finlande termine à la deuxième place avec 37 médailles (mais 14 en or). Ultra dominateurs en athlétisme (fond et demi-fond), ses champions sont surnommés les "Finlandais volants". Parmi ceux-ci, Paavo Nurmi ("le coureur au chronomètre", avec lequel il vérifiait les temps de passage qu’il s’était fixé), se couvre d’or avec 5 médailles (il remporte le 1500m et le 5000m une heure plus tard) et Ville Ritola, 6 médailles dont 4 d’or.
On pourrait ajouter à cette liste de célébrités, mais celles-là bien négatives, les deux équipes de rugby des Etats-Unis (vainqueur) et celle de France ainsi que leurs supporters qui, lors de la finale, ont oublié l’esprit de l’olympisme avec plusieurs violentes bagarres ; leur affrontement a, d’ailleurs, conduit à la suppression du rugby des épreuves olympiques (jusqu’en 2016).
Les J.O. de 1924, media et produits dérivés publicitaires
Les media ont magnifié ces Jeux : tout d’abord par les retransmissions, en direct, à la radio, mais aussi avec la sonorisation des stades lors des épreuves.
Ensuite, ils ont inspiré le cinéma qui les a portés à l'écran dans le film aux 4 oscars "Les Chariots de feu", racontant (spoiler alert) l’histoire de deux athlètes britanniques, l’un anglais combattant l’antisémitisme et l’autre protestant écossais qui refusa de courir la finale du 100 mètres (parce que c’était un dimanche), alors qu’il était favori, mais remporta le 400 mètres (couru un jeudi) laissant la victoire sur 100 mètres à l’anglais.
Il a fait d’un sportif, une vedette, Johnny Weissmuller, qui n’a jamais perdu une course en compétition, a ainsi incarné Tarzan dans 12 films.
Tout portait la marque olympique: commerces, marques de cycles ou de rasoirs, modèles de sacs pour dames, éventail publicitaire, série de cartes postales publicitaires ayant pour thème le sport, etc.
Dans de nombreux villages en France, des bistrots portent le nom de Café des Sports ; cette enseigne est apparue en 1924 à l’occasion des Jeux.
Conclusion
Pour le côté positif, ces Jeux de la VIIIe Olympiade ont été le cadre de rencontres et d'échanges. Ils semblent avoir incarné l'esprit de l’olympisme, de l'innovation et de l'excellence à la française.
Mais, toute médaille a son revers : si pendant toute la compétition, les Parisiens ont vécu à l’heure des J.O, les quelques mois précédant l’événement n’ont pas été évidents à vivre.
Ainsi, les prix ont augmenté (notamment l’hôtellerie pour accueillir les touristes étrangers), les étudiants ont été priés de quitter les logements qu’ils louaient à bas prix, pour les laisser aux touristes, sans oublier d’augmenter leurs tarifs.
Les media ont longtemps craint que Paris ne soit pas prête pour ces Jeux.
Les élections législatives qui ont eu lieu au mois de mai ont été marquées l’arrivée d’une nouvelle majorité.
Les "traces" de la Première Guerre mondiale encore présentes dans les relations diplomatiques avec l’Allemagne ont conduit à ne pas l’inviter à ces J.O. (malgré le souhait inverse de certains, notamment Pierre de Coubertin).
Il n’y a pas d’erreur, tout ceci, c’était bien en 1924 ! Toute ressemblance avec des événements d’actualité ne sont peut-être pas des coïncidences !
L’Histoire est un perpétuel recommencement !
Le penseur athénien Thucydide (460-397 av JC), homme politique et historien
Programme des épreuves Paris 2024 ICI
Par Dominique Gravois
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